Le Français Bertrand Bonello emprunte à l’esprit de David Lynch dans « La Bête », présenté dimanche en compétition à Venise, avec une Léa Seydoux embarquée dans un voyage hallucinatoire à travers le temps.
Avec ce film de 2h26, cette figure d’un cinéma d’auteur parfois exigeant (« Nocturama » en 2016, « Saint Laurent » en 2015…) fait une entrée remarquée dans la course au Lion d’or.
Naviguant entre les années 1910, le contemporain et l’an 2044, lorsque l’intelligence artificielle aura pris le contrôle de l’humanité pour la rendre moins sentimentale et plus rationnelle, le film est très librement adapté d’une nouvelle de Henry James, « La Bête dans la Jungle ». Ce texte a déjà inspiré Marguerite Duras, François Truffaut et plus récemment un autre réalisateur autrichien Patric Chiha, qui en a sorti cet été une version avec Anaïs Demoustier.
Cette nouvelle est « l’un des mélodrames les plus déchirants » qui existe, a estimé Bertrand Bonello en conférence de presse. Dans « La Bête », Léa Seydoux incarne une artiste, Gabrielle, qui doit replonger dans ses souvenirs pour les purger de tous sentiments, en replongeant dans ses vies antérieures. Entre amour et terreur, elle va revivre par flashs ses émotions pour un homme qui traverse le temps, Louis, incarné par le Britannique George McKay.
Surnaturel sans tomber dans le mystique, le film tisse des liens à travers le temps. Les personnages féminins mystérieux, les indices et motifs cachés dans le décor, rappellent fortement le David Lynch de « Mulholland Drive » ou de « Twin Peaks », œuvres devenues cultes.
Bonello a précisé avoir voulu mélanger mélodrame, science-fiction, film de genre et films d’horreur sanglants. « La structure est complexe, c’est comme un jeu mathématique, mais à l’intérieur tout est simple, les émotions sont basiques (…) Ça parle de la peur et de l’amour », a-t-il expliqué.
Le film, qui doit sortir en salles le 28 février 2024, se conclut par un hommage à Gaspard Ulliel, mort accidentellement à 37 ans l’an dernier. L’acteur, qui fut le Yves Saint-Laurent de Bonello en 2015, devait tenir le rôle qui a finalement échu à George MacKay.
Gaspard Ulliel « est mort un mois avant le tournage. Nous avons décidé de repousser le film mais de le continuer quand même. Nous ne voulions pas le remplacer par un acteur français, pour ne pas qu’il y ait de comparaison, on a décidé d’aller ailleurs », en faisant auditionner des Anglo-saxons, avant de choisir McKay, a-t-il précisé.