Des chercheurs ont découvert que les chats pouvaient ronronner sans solliciter leurs muscles ou leur système nerveux ! Leur secret réside dans leur larynx.
Difficile à croire mais le ronronnement du chat (Felis sylvestris catus) – qui apparaît uniquement lorsque l’état général de l’animal y est propice, un état de béatitude ou, à l’inverse, une situation de souffrance – gardait des mystères pour les chercheurs jusqu’à peu.
« On n’a pas encore identifié de centre du ronronnement dans le cerveau, admettait Jean-Yves Gauchet, vétérinaire à Toulouse, dans un précédent article de Sciences et Avenir datant de 2018. Mais grâce à une étude menée par l’Université de Vienne et publiée dans la revue Current Biology, nous en savons un peu plus sur ce phénomène sonore intrigant.
Pas besoin de cerveau pour ronronner !
Dans cette nouvelle étude, Christan T. Herbst, chercheur autrichien spécialisé en acoustique, et son équipe se sont penchés sur le larynx (partie de l’organe vocal, cartilagineuse, se trouvant juste après le pharynx et se poursuivant par la trachée, comme sur la photo ci-dessous) du chat, qui est l’organe central du ronronnement.
Le chat, malgré sa petite taille, est capable de produire des sons à très basse fréquence (20 à 30 Hz) en plus des miaulements, feulement, cris, etc. Avant, les chercheurs pensaient que ces ronronnements étaient induits par des contractions musculaires actives (AMC) causées par des impulsions électriques venant d’un motoneurone (neurone faisant la jonction entre le système nerveux et des groupes musculaires) et impliquant de ce fait le système nerveux central dont le cerveau fait partie.
Pour vérifier cette théorie, l’équipe de chercheurs a excisé plusieurs larynx. Normalement, une fois ôté de l’animal, l’organe ne sert plus à rien et ne peut pas émettre de sons car il n’y a aucune contraction musculaire ni induction neuronale. Sauf que, contre toute attente, les larynx ont produit des sons de basses fréquences, similaires au ronronnement des chats, et ce, en continu.
Mais alors, comment l’expliquer ? « Nous suggérons que ce régime vibratoire se combine avec une spécialisation anatomique inhabituelle et peu étudiée (des coussinets dans les cordes vocales du chat) pour permettre à la phonation à fréquence de ronronnement d’être pilotée par les mêmes mécanismes aérodynamiques qui génèrent des vocalisations à plus haute fréquence comme les miaulements, les trilles et cris », explique le professeur Herbst dans son article.
Des coussinets sur les cordes vocales pour mieux vibrer
Une fois cette découverte réalisée, les analyses histologiques ont confirmé la présence, autour du larynx, d’un tissu conjonctif (type cellulaire très répandu dans les organismes, qui permet la connectivité des autres types tissulaires) de quatre micromètres d’épaisseur (ce qui est beaucoup à cette échelle), qu’ils ont nommés coussinets grâce à leurs manières d’entourer les cordes vocales.
Cette spécificité anatomique permettrait d’expliquer partiellement comment les chats arrivent à émettre des sons si forts et si grave (à titre de comparaison, la voix grave humaine se situe entre 75 et 100 Hz) en continu. Cependant, cette capacité n’a pas encore été décrite et observée en condition in vivo (c’est-à-dire sur un chat entier et vivant).
Les scientifiques n’excluent pas les autres hypothèses permettant d’expliquer l’origine des ronronnements : « Compte tenu des recherches antérieures et des données empiriques présentées ici, nous émettons l’hypothèse que le ronronnement in vivo du chat est facilité par la coexistence de l’AMC et du MEAD (« MyoElastic AeroDynamic », théorie physique énoncée dans les années 1950 et qui évoque le principe des regroupements des cordes vocales, grâce aux muscles les entourant, afin de faciliter le passage de l’air depuis les poumons et de produire différents types de sons, ndlr) », assure Christan T. Herbst dans l’article.
Ainsi, malgré les avancées dans le domaine, il reste encore beaucoup de part d’ombre à éclaircir pour arriver à comprendre tous les mécanismes du ronronnement de nos félins domestiques préférés.