La Fashion Week de Paris a transcendé les frontières du genre, s’affranchissant des conventions binaires pour fusionner sans complexe les créations homme et femme sur ses podiums.
Alors que les défilés apparaissent plus mixtes que jamais, les raisons invoquées ne sont pas uniquement artistiques, mais également économiques, selon Gert Jonkers, rédacteur en chef de Fantastic Man, observateur de la mode masculine depuis 24 ans.
« Créer un défilé coûte très cher, alors autant mettre deux collections dedans », explique-t-il. Des maisons de renom telles que Louis Vuitton, Yohji Yamamoto, et Kenzo ont décidé de jouer la carte de l’égalité en invitant hommes et femmes à partager les podiums.
Une tendance qui se manifeste également chez AMI Paris, enseigne française qui a débuté avec un focus sur le tailoring masculin avant de s’étendre au féminin. Alexandre Mattiussi, le créateur d’AMI Paris, a délibérément uni les genres, habillant Laetitia Casta d’un manteau de cavalier qui aurait pu être porté aussi bien par Vincent Cassel, son autre égérie.
Matthieu Bobard Delière, journaliste mode chez Elle, affirme que le distinguo de genre dans les collections ne vivra peut-être pas sa dernière année, mais certainement l’une des dernières. « Il n’y a même plus de discussion », note-t-il. « Cela s’est fait très naturellement, il n’y a plus de moment où l’on se pose la question de savoir pour quel genre cette pièce est ».
Malgré cette évolution vers un vestiaire unisexe, les créateurs du luxe masculin restent prudents quant à l’introduction de robes ou jupes spécifiquement conçues pour les hommes. Certaines grandes maisons, telles que Dior et Dries Van Noten, résistent encore à cette tendance. Le tapis rouge reflète également cette nouvelle masculinité, avec des icônes hétérosexuelles et cisgenres explorant la fluidité dans leurs tenues de gala, adoptant des styles plus flamboyants, sexy, pailletés, et strassés.
Pour accélérer cette déconstruction des normes de genre, des phénomènes tels que Ken, l’anti-héros du film « Barbie », et le « himbo » (homme bimbo) qui se moque des regards extérieurs, ont joué un rôle crucial. Gert Jonkers se réjouit de voir la mode transcender « la stricte division », tout en appelant à la prudence pour éviter un mélange artistiquement et commercialement faible.
En réponse à ces évolutions, Nicolas Delarue, l’un des responsables de la Fédération de la haute couture et de la mode, organisatrice de la Fashion Week parisienne, déclare : « l’homme est une femme comme les autres ». La Fashion Week de Paris semble ainsi marquer un tournant majeur vers une mode plus inclusive, défiant les normes de genre pour créer un espace où la créativité et l’expression individuelle n’ont plus de frontières prédéfinies.