Les magistrats de Marseille ont sonné l’alarme face à la montée en puissance des narcotrafics dans la seconde ville de France. Les trafiquants emploient diverses méthodes persuasives pour soudoyer les agents publics.
La faute, selon eux, réside en partie dans l’asymétrie des moyens entre l’État et les trafiquants. Avec un chiffre d’affaires annuel estimé à 3 milliards d’euros, ces derniers parviennent à corrompre certains agents publics. La procureure de Paris, Laure Beccuau, exprimait récemment ses inquiétudes quant au « risque de corruption au sein de nos propres institutions ».
Les trafiquants déploient des tactiques bien rodées pour corrompre les forces de l’ordre. Tout d’abord, ils recourent à des méthodes traditionnelles telles que la séduction, mais ensuite la pression, l’intimidation voire la violence, parfois en kidnappant des membres de la famille des agents publics pour obtenir des informations sur les enquêtes en cours ou sur des clans rivaux.
Ensuite, ils ciblent les agents vulnérables, ceux qui se sentent sous-payés ou attirés par l’appât du gain, prêts à enfreindre les règles pour un profit supplémentaire. Une méthode plus récente consiste en une forme d’ubérisation de la corruption, avec des petites annonces sur les réseaux sociaux proposant des sommes modiques en échange d’informations confidentielles.
L’objectif des trafiquants est de mieux anticiper les opérations policières, afin de contourner les règles et éviter d’être pris. Les douaniers et la police aux frontières sont particulièrement sollicités, car ils facilitent le passage de la drogue dans les flux de marchandises. Savoir à l’avance quand une opération policière est prévue dans leur quartier permet aux trafiquants de se mettre à l’abri et de disparaître.
Toutes ces pratiques inquiètent les autorités. Car la corruption est difficile à détecter. Les mouvements d’argent sont discrets, souvent de petites sommes échangées, et les agents peuvent transmettre des informations aux trafiquants sans jamais les rencontrer en personne.
Face à cette menace, le nombre d’enquêtes sur la corruption a doublé à l’Inspection générale de la police nationale. Cependant, ces chiffres doivent être relativisés, alors que près de 150 000 fonctionnaires de police ont accès aux fichiers.
Mercredi dernier, le procureur de Marseille, Nicolas Bessome, a appelé à une prise de conscience devant la commission d’enquête du Sénat. Greffiers, agents pénitentiaires, douaniers, gendarmes, policiers… tous sont concernés par cette menace qui gangrène les institutions chargées de protéger la société contre le fléau de la drogue.