Le procureur de la Cour pénale internationale (CPI), Karim Khan, a annoncé lundi la demande de mandats d’arrêt contre le Premier ministre israélien Benyamin Nétanyahou, le ministre de la Défense Yoav Gallant, ainsi que plusieurs dirigeants du Hamas. Cette décision intervient après des années d’enquête sur des crimes de guerre et des crimes contre l’humanité présumés commis dans la bande de Gaza et en Israël.
Cette requête du procureur couvre des événements remontant à 2021 et inclut les violences récentes.
Les accusations contre Benyamin Nétanyahou et Yoav Gallant sont particulièrement sévères. Elles incluent « l’affamement délibéré de civils », « l’homicide intentionnel » et « l’extermination ». Les dirigeants du Hamas, de leur côté, font face à des accusations de « l’extermination », « le viol et d’autres formes de violence sexuelle », ainsi que de « la prise d’otages en tant que crime de guerre ».
Karim Khan a déclaré que son équipe avait rassemblé un « volume important » de preuves sur des « incidents pertinents », affirmant que ces éléments démontraient clairement la culpabilité des individus visés. L’enquête, lancée en 2021, a été étendue pour inclure l’escalade des hostilités et de la violence depuis les attaques du Hamas du 7 octobre 2023 sur le sol israélien.
La demande de mandats d’arrêt ne signifie pas automatiquement leur émission. Le bureau du procureur a transmis ses conclusions aux chambres préliminaires de la CPI, composées de trois juges indépendants, chargées de déterminer s’il existe des motifs raisonnables de croire que les personnes visées ont commis les crimes en question.
Si les juges estiment que les preuves sont insuffisantes, ils peuvent demander au procureur de fournir davantage d’éléments ou de modifier les charges. Ils ont également la possibilité de rejeter complètement la demande. Cependant, Olivier Corten, professeur de droit international à l’université libre de Bruxelles, estime que les rapports du procureur sont suffisamment détaillés et rigoureux pour que les juges émettent une décision définitive.
L’annonce de la demande de mandats d’arrêt a suscité des réactions vives à travers le monde. Les partisans de la CPI voient cette démarche comme une avancée majeure vers la justice et la responsabilisation des dirigeants politiques et militaires. Cependant, Israël a réagi avec colère, on peut le comprendre, rejetant la légitimité de la CPI et accusant l’institution de partialité.
La question de l’arrestation des personnes visées est également complexe. Si un mandat d’arrêt est émis, tout État membre de la CPI serait théoriquement obligé d’arrêter Benyamin Nétanyahou s’il se trouvait sur leur territoire. Néanmoins, la CPI ne dispose pas de force de police propre et dépend de la coopération des États membres. Israël, les États-Unis, la Chine et la Russie ne sont pas membres de la CPI, offrant ainsi une certaine protection aux personnes visées par ces mandats d’arrêt.
Au-delà des aspects pratiques, cette demande envoie un message fort :
Ce qu’a fait le bureau du procureur, c’est de montrer qu’il n’y a pas d’État au-dessus des lois, de dirigeant au-dessus des lois et qu’une vie palestinienne vaut autant qu’une vie israélienne
commente Emmanuel Daoud, avocat spécialiste en droit pénal international.
Cette action souligne l’engagement de la CPI à poursuivre tous les individus responsables de crimes graves, quels que soient leur statut ou leur influence politique.
Les juges de la chambre préliminaire doivent maintenant prendre leur décision. Le processus peut être long, avec des semaines voire des mois s’écoulant entre la demande de mandat d’arrêt et la décision finale. Si les juges émettent les mandats d’arrêt, les personnes visées seront officiellement recherchées par la CPI. En cas d’arrestation, elles seront entendues en comparution initiale, suivie d’une audience avec l’accusation et les représentants légaux des victimes. Les juges décideront ensuite s’il existe suffisamment de preuves pour renvoyer l’affaire en jugement.