En plein cœur de Rome, le Musée National Romain abrite depuis deux ans une salle dédiée aux antiquités sauvées des griffes du trafic illégal. Poétiquement nommé « Musée de l’art sauvé », ce lieu singulier, installé dans l’enceinte des thermes de Dioclétien, raconte l’incroyable périple des œuvres pillées, de leur découverte clandestine à leur retour en Italie.
L’histoire de ces trésors est souvent similaire. Exhumés illégalement des nécropoles étrusques au nord de Rome ou des sites archéologiques des Pouilles, ces artefacts traversaient les frontières via un réseau d’antiquaires, parfois basés à Genève. De là, ils étaient vendus à des collectionneurs étrangers ou même exposés dans de grands musées, notamment aux États-Unis.
Depuis des années, l’Italie mène une bataille juridique et diplomatique pour récupérer ces œuvres précieuses. Le succès le plus récent de cette campagne est la restitution par le musée Getty de Los Angeles, en 2022, d’un ensemble de trois statues en terre cuite représentant « Orphée et les sirènes », reconnues comme provenant de fouilles illégales. Exposées dans une exposition dédiée aux terres cuites italiennes, ces statues sont un exemple parmi tant d’autres de l’engagement du musée à contextualiser ces œuvres au sein d’expositions thématiques, plutôt que de simplement les exposer.
Les fouilles clandestines entraînent des conséquences très négatives sur la connaissance des cultures antiques
déplore M. Verger.
En effet, la perte d’un objet est déjà significative, mais l’absence de contexte archéologique lors de sa découverte altère irrémédiablement les connaissances historiques que l’on pourrait en retirer.
Actuellement, le musée est temporairement fermé pour travaux en préparation du jubilé de 2025, une année sainte proclamée par le pape François qui attirera des millions de pèlerins. Cependant, cette fermeture n’est qu’un état transitoire, reflétant la nature perpétuellement mouvante du musée. À chaque exposition, le musée se réinvente pour mieux mettre en valeur les antiquités qu’il accueille.
Un autre trésor pourrait bientôt rejoindre les rangs des œuvres rapatriées. « L’Athlète de Fano », une statue en bronze du IVe siècle avant J.C. Jusqu’ici exposée au musée Getty, cette pièce fait l’objet d’un litige remporté récemment par l’Italie auprès de la Cour européenne des droits de l’Homme. La statue, découverte il y a 60 ans dans la mer Adriatique par des pêcheurs italiens, a depuis été l’objet de multiples transactions avant que l’État italien puisse en revendiquer la propriété.
Ce parcours tumultueux est emblématique des nombreuses pièces pillées sur le sol italien, riche de trésors antiques. Cependant, l’exposition de l’Athlète de Fano au musée des arts sauvés reste incertaine. « Rien n’est sûr », avertit M. Verger.
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