Ce mardi 17 septembre, l’émission « Cash Investigation » a frappé fort. Élise Lucet et son équipe ont emmenés les Français dans les coulisses d’un épisode méconnu de la campagne présidentielle de 2017, avec un protagoniste inattendu : McKinsey, le géant du conseil. Cette nouvelle enquête soulève une question délicate, voire dérangeante : quelle est la véritable place des cabinets de conseil dans nos démocraties ?
Derrière les débats politiques, les discours et les meetings, l’enquête pointe du doigt une réalité souvent invisible. Il ne s’agit pas seulement d’idées ou de programmes, mais aussi de stratégies mûrement réfléchies, parfois concoctées dans l’ombre par des experts en conseil. Et c’est précisément ce que « Cash Investigation » s’efforce de démontrer. Des consultants de McKinsey auraient prêté main-forte à Emmanuel Macron bien avant qu’il ne soit officiellement candidat, notamment lors d’un fameux dîner en 2015, où l’idée d’un « nouveau monde » aurait pris forme.
Ce qu’on pourrait interpréter comme une simple anecdote de campagne s’avère bien plus complexe. Un projet nommé « Chixculub » (en référence à l’astéroïde qui a marqué la fin des dinosaures) aurait été pensé dès cette période pour porter l’ambition présidentielle du candidat Macron. L’image est puissante, presque hollywoodienne. Mais ce qui intrigue, c’est la participation de membres de McKinsey, parmi lesquels Karim Tadjeddine, une figure clé du cabinet en France. Leur rôle dépasse-t-il la simple amitié ou engagement personnel ? C’est là que le bât blesse.
Cette relation floue entre consultants et candidats pose la question de l’éthique. Le témoignage anonyme d’un participant à ce dîner est révélateur : certains membres de McKinsey auraient « gracieusement » apporté leur expertise pour structurer la campagne. Si cette aide est avérée, où est la frontière entre l’engagement citoyen et une forme déguisée de soutien financier ou logistique interdit par la loi ? Car rappelons-le, en France, les dons d’entreprises sont proscrits.
L’affaire McKinsey ne se limite pas à ce dîner ou à la campagne de 2017. Le cabinet a, au fil des années, noué des liens avec l’État, accumulant des contrats publics estimés à près de 70 millions d’euros, tout en échappant à l’impôt en France pendant une décennie. Le contraste est frappant. Comment un acteur aussi influent peut-il à la fois être si discret et omniprésent ?
Cette externalisation de l’expertise, autrefois monopole des fonctionnaires, soulève des questions sur la souveraineté de nos décisions politiques. Sommes-nous en train de confier des dossiers sensibles et une partie de notre démocratie à des acteurs privés, aussi compétents soient-ils, mais dont les intérêts peuvent diverger de ceux de la nation ?
La réponse n’est pas simple, et l’enquête judiciaire ouverte en 2022 par le parquet national financier devra apporter des éclaircissements.
Cash Investigation « McKinsey, une firme au coeur du pouvoir ». Disponible en replay sur france•tv