Depuis le début de la pandémie de covid-19, l’hydroxychloroquine est passée de remède prometteur à symbole de la guerre d’information sur les traitements. Un médicament qui, autrefois, ne suscitait guère de débat est devenu l’épicentre d’une controverse mondiale, alimentée par des médias parfois plus intéressés par le sensationnalisme que par la rigueur scientifique. Alors, que s’est-il vraiment passé ? Est-il possible que, sous l’épaisse couche de désinformation et de polémiques, se cache une vérité scientifique éclipsée ?
Le 22 mai 2020, la revue médicale The Lancet publie une étude qui prétendait démontrer les dangers de l’hydroxychloroquine. La nouvelle fait l’effet d’une bombe. En quelques heures, la plupart des médias s’emparent de l’information : le traitement tant débattu, défendu par certains comme un espoir face au covid-19, serait en réalité dangereux, et potentiellement mortel. L’histoire est trop belle pour être remise en question.
Mais à peine dix jours plus tard, retournement de situation. L’étude est rétractée. Des anomalies dans les données, des erreurs de méthodologie, et, finalement, l’incapacité à reproduire les résultats. Ce qui aurait dû être un signal d’alarme sur la manière dont les études scientifiques sont relayées se dissout dans un silence médiatique assourdissant. Les gros titres sur la rétractation ? Ils sont restés beaucoup plus discrets. Une fausse information peut exploser dans l’espace public, mais la correction, elle, glisse souvent sous le radar.
L’histoire de l’étude Pradelle et al., publiée en janvier 2024, ressemble étrangement à celle du Lancet. Cette étude, qui affirmait que 17 000 personnes auraient pu mourir de la prise d’hydroxychloroquine, était rapidement relayée par certains médias comme une preuve supplémentaire de l’inefficacité et des dangers du traitement. Il s’avérera finalement que l’étude était frauduleuse, basée sur des données fabriquées. Huit mois plus tard, elle est rétractée, mais le mal est fait : dans l’esprit du grand public, l’hydroxychloroquine reste associée au danger.
Là encore, la rétractation est passée sous silence. Les médias qui s’étaient précipités pour diffuser les conclusions initiales n’ont que peu ou pas corrigé leurs erreurs. La machine médiatique a-t-elle encore le temps pour la nuance ? Les études frauduleuses bénéficient d’une large couverture, mais les rétractations, elles, semblent n’intéresser personne.
Les réseaux sociaux : Champ de bataille de la vérité et de la désinformation
Face à ce déséquilibre médiatique, une autre force s’est mise en marche : les réseaux sociaux. Twitter (ou X, comme on l’appelle désormais) et autres plateformes ont donné voix à des experts indépendants, des scientifiques et des associations citoyennes, comme BonSens.org. Ces plateformes ont permis à une intelligence collective de se former, pour analyser, critiquer et parfois démentir les conclusions hâtives relayées par les médias traditionnels.
Lorsque la récente étude COPCOV, une étude randomisée en double aveugle de 4 652 participants, est publiée, c’est sur les réseaux sociaux que l’information commence à circuler. Cette étude, qui confirme une efficacité modérée de l’hydroxychloroquine en prévention du covid-19 symptomatique, est quasiment ignorée par les médias traditionnels. Pourtant, les résultats sont là : une réduction significative des cas symptomatiques, avec un rapport de risque (RR) de 0,43. Une méta-analyse des essais similaires conforte encore ces résultats, mais la couverture médiatique reste discrète.
Dès que l’information est partagée sur X, des critiques fusent : on parle d’« effectif réduit » ou de « biais méthodologiques ». Or, avec 4 652 participants, il s’agit de la plus grande étude à ce jour sur l’hydroxychloroquine. Les réseaux sociaux, loin d’être un simple outil de diffusion, sont devenus un véritable champ de bataille où la désinformation côtoie les tentatives de vérité.
Le monde de la science sous pression ?
L’un des aspects les plus troublants de l’histoire de l’hydroxychloroquine est la pression exercée sur la science elle-même. Les auteurs de l’étude COPCOV mentionnent les nombreuses difficultés rencontrées pour recruter des participants, en grande partie à cause des polémiques autour du médicament. La science peut-elle vraiment avancer dans un climat aussi polarisé ?
Les fausses informations sur la prétendue toxicité de l’hydroxychloroquine ont ralenti la recherche. Des essais, comme celui mené au Royaume-Uni (ReCoveRy), ont administré des doses toxiques du médicament à des patients hospitalisés, déformant ainsi les conclusions sur son efficacité. Les chercheurs de COPCOV déplorent que ces résultats biaisés aient été généralisés à tous les stades de la maladie, alors que l’efficacité du traitement pourrait être plus marquée en prévention ou en phase précoce.
Le coût du silence : Des vies et des économies perdues
Outre l’aspect sanitaire, l’étude COPCOV révèle une donnée capitale : le traitement à l’hydroxychloroquine aurait permis de réduire de manière significative les arrêts de travail des soignants. Sur une période de 90 jours, les participants sous traitement ont eu 104 jours d’arrêt de travail en moins par rapport au groupe placebo. Combien de soignants auraient pu rester en poste ? Combien de patients auraient pu être pris en charge si ce traitement avait été utilisé ?
Le refus de prescrire l’hydroxychloroquine a-t-il coûté des vies ? Il est légitime de poser la question. Dans un contexte où les hôpitaux manquaient cruellement de personnel, l’impact d’un tel traitement, s’il avait été autorisé, pourrait avoir été déterminant.
Au-delà des traitements : Une guerre économique ?
La saga de l’hydroxychloroquine ne se résume pas à une simple question de science. Elle révèle une lutte sous-jacente, plus insidieuse, entre des intérêts économiques et des traitements libres de droit. Les molécules comme l’hydroxychloroquine, qui ne rapportent plus rien aux laboratoires pharmaceutiques, deviennent des menaces pour un modèle économique basé sur l’innovation coûteuse. La question qui se pose alors est : les décisions sanitaires sont-elles encore guidées par la santé publique ou par des intérêts financiers ? La vérité, dans ce contexte, semble toujours courir derrière le mensonge.