L’acteur oscarisé Adrien Brody a fait un retour très remarqué à la Mostra de Venise avec « The Brutalist », un film ambitieux et monumental de 3 heures et 30 minutes, réalisé par Brady Corbet. Présenté en compétition officielle, ce long-métrage revisite le mythe américain de l’intégration et met en lumière ses failles profondes à travers le parcours poignant d’un architecte, survivant de la Shoah.
Dans « The Brutalist », Adrien Brody incarne László Toth, un architecte hongrois fictif mais inspiré de figures historiques du mouvement Bauhaus. À la fin de la Seconde Guerre mondiale, László émigre aux États-Unis, pays qui symbolise pour lui une terre de renaissance et de nouveaux commencements. Mais le rêve américain se révèle plein de désillusions : isolé, sans argent, il sombre dans la drogue et la misère avant de rencontrer un millionnaire de la banlieue de Philadelphie, interprété par Guy Pearce. Ce dernier lui offre un toit et commande la construction d’un imposant bâtiment, un projet qui prendra des années.
À travers l’histoire de László Toth, le film explore les répercussions persistantes du traumatisme de la Shoah, non seulement dans l’esprit des survivants et de leur entourage, mais aussi à travers leur travail et leur vision du monde. Tandis que le personnage principal entrevoit enfin la possibilité de s’intégrer pleinement et de faire venir sa famille restée en Europe, il se heurte à une toile de préjugés et de haine, alimentée par l’antisémitisme latent de l’époque.
« The Brutalist » se distingue par sa profondeur et son ambition visuelle. Tourné en 70 mm, l’un des formats pellicule les plus somptueux, le film offre une immersion totale, ponctuée par un quart d’heure d’entracte qui rappelle les épopées cinématographiques classiques. L’œuvre de Brady Corbet s’inscrit dans une démarche de cinéma d’auteur : elle joue sur les nuances et surprend constamment le spectateur en empruntant des chemins narratifs inattendus.
L’architecture, thème central du film, devient ici une métaphore des institutions humaines, de leurs créations aux failles qui les rongent. Comme l’a expliqué Brady Corbet lors de la conférence de presse à Venise, « Il y a tellement d’architectes du Bauhaus talentueux et dont on n’a jamais pu voir ce qu’ils auraient voulu construire, quel futur ils imaginaient. » Pour lui, « The Brutalist » est un hommage à ces artistes dont les visions ont été brisées par l’histoire.
Adrien Brody, qui a remporté l’Oscar il y a vingt ans pour son interprétation d’un survivant du ghetto de Varsovie dans « Le Pianiste » de Roman Polanski, reprend avec « The Brutalist » le cours de l’histoire occidentale là où il l’avait laissé : à la fin de la Seconde Guerre mondiale. L’acteur a déclaré avoir ressenti « une compréhension et une empathie immédiates pour le personnage » de László Toth, en grande partie en raison de ses propres racines familiales.
« Ma mère est une photographe new-yorkaise, mais elle est aussi une immigrée hongroise qui a fui la Hongrie en 1956 et s’est réfugiée aux États-Unis », a confié Adrien Brody. « Comme László, elle a dû tout recommencer et a poursuivi le rêve de devenir une artiste. » Pour Brody, ce film n’est pas seulement une œuvre de fiction, mais un rappel poignant des leçons du passé et de leur pertinence pour le présent.
« The Brutalist » est décrit comme une « histoire virtuelle », un exercice de mémoire cinématographique qui, bien qu’il soit une fiction, possède une résonance terriblement réaliste. Le film, fruit de sept ans de travail, est dédié à « ces artistes qui n’ont pas pu accomplir leur vision », a précisé Corbet.
Avec sa profondeur thématique, ses performances d’acteurs remarquables, et sa mise en scène visuellement captivante, ce long métrage s’annonce comme un sérieux concurrent dans la course au Lion d’or de cette édition de la Mostra de Venise.