Et voilà, la comédie politique reprend ses droits à l’Assemblée nationale. Michel Barnier, tel un funambule sans filet, est tombé sur les flancs abrupts du précipice, menacé par une motion de censure qui l’a fait chuter. Spectacle fascinant, certes, mais que personne ne s’y trompe : ce n’est pas la Constitution qui vacille, c’est le théâtre politique qui s’enlise dans son propre cynisme.
Depuis quelques semaines, les députés rivalisent d’ingéniosité pour offrir le meilleur du grand guignol parlementaire. La motion de censure, outil théoriquement sérieux, est devenue l’équivalent politique d’un saut à l’élastique : spectaculaire, risqué, mais sans conséquences structurelles. Le gouvernement Barnier est tombé, certes, mais soyons honnêtes : qui pleurera vraiment cette chute ?
La France survivra, comme elle l’a toujours fait. En attendant, le gouvernement démissionnaire continuera à expédier les affaires courantes, histoire de faire croire que tout est sous contrôle. Une gestion en mode « pilote automatique », parfait pour une nation qui semble, elle aussi, fonctionner sur l’inertie.
Quelques experts constitutionnels sont toujours prêts à calmer le jeu. Dominique Rousseau préfère parler de « crise ministérielle ». Rien de grave, nous dit-il. Après tout, perdre une majorité parlementaire, ce n’est qu’un petit contretemps dans une démocratie bien rodée. Et puis, soyons francs, ce n’est pas comme si le gouvernement Barnier avait une vision éclatante pour le pays. Perdre sa majorité ? Peut-être est-ce une bénédiction déguisée.
Mais si Dominique Rousseau se veut rassurant, il n’hésite pas à pointer du doigt le système français. Contrairement à nos voisins allemands, qui ne censurent un gouvernement qu’en ayant déjà une alternative prête, la France préfère le chaos. Votons la censure, dégageons le gouvernement, et après ? On improvisera. Cela sent la grande maturité politique, non ?
La Ve République, un vieux costume qui gratte
Et si le problème venait de plus loin ? Certains murmurent que la Ve République est un vieux costume usé, mal ajusté pour les temps modernes. Anne Levade, toujours sur le pont pour défendre la Constitution, rappelle que le cadre fonctionne. Ce n’est pas la faute du texte si les politiciens d’aujourd’hui sont incapables de construire des majorités stables.
C’est vrai, bien sûr. Mais cela n’empêche pas cette vieille machine institutionnelle de grincer à chaque secousse. Elle n’est pas cassée, mais elle manque sérieusement de lubrifiant. À force de bricoler avec des coalitions improbables et des alliances de circonstances, la Ve République risque de se retrouver coincée dans une impasse politique permanente.
Une classe politique en roue libre
Au fond, ce qui choque le plus, c’est l’irresponsabilité flagrante de nos élites. Députés et ministres jouent leur partition comme si le pays n’était qu’un décor de carton-pâte. Ils s’accusent mutuellement d’être la cause du blocage, tout en multipliant les postures théâtrales. Mais qui, dans tout ce petit monde, se soucie vraiment des français ?
La motion de censure est le dernier acte de cette farce. Michel Barnier est tombé, un nouveau gouvernement sera nommé, et le cycle recommencera. Rien ne changera vraiment, car, comme toujours, le spectacle prime sur la substance.