L’Inspection générale de l’administration lui avait reproché d’avoir accordé « un traitement privilégié » à l’une des associations bénéficiaires du fonds.
Il démissionne. Christian Gravel avait peiné à justifier devant les sénateurs la gestion problématique de cette manne financière lancée à la suite de l’assassinat de Samuel Paty.
Le préfet responsable du Comité interministériel de prévention de la délinquance et de la radicalisation (CIPDR) chargé de la gestion du Fonds Marianne de lutte contre le séparatisme, a « souhaité remettre sa démission, qui a été acceptée », a annoncé le ministère de l’intérieur dans un communiqué.
Cette décision fait suite à la publication d’un rapport de l’Inspection générale de l’administration (IGA) sur la subvention versée à l’une des associations bénéficiaires du fonds. La synthèse de ce rapport, transmis par la place Beauvau, dénonce « un traitement privilégié » réservé par M. Gravel à cette association.
« Le secrétariat général du CIPDR n’a pas accompli les diligences nécessaires au bon suivi de l’exécution de la subvention versée à l’USEPPM », la principale association bénéficiaire du fonds, peut-on y lire. « Ce manquement est, pour partie, imputable à l’association, qui n’a pas transmis dans les délais la documentation exigée par la convention. Il procède également de défaillances dans l’organisation du service, d’un défaut de vigilance et d’un traitement privilégié réservé à cette association. ».
C’est sous l’égide de Christian Gravel qu’ont été attribués, en 2021, les 2,5 millions d’euros du fonds Marianne – un label de communication en réalité, puisque l’argent est prélevé sur la manne du fonds interministériel de prévention de la délinquance – destinés à financer des actions de prévention de la radicalisation en ligne, notamment en développant un « contre-discours ».
« ni transparent ni équitable »
L’association de l’essayiste Mohamed Sifaoui, l’Union fédérative des sociétés d’éducation physique et de préparation militaire (USEPPM), a touché la plus grosse somme parmi les dix-sept structures retenues par le comité de sélection : 355 000 euros, pour un projet détaillé dans un document de six pages.
La plate-forme de l’USEPPM, baptisée « iLaïc », devait aller « se confronter directement » avec les activistes islamistes et diffuser un discours de riposte constitué de contenus multimédias. 500 contenus ont été produits, agrégeant à la fois des vidéos et de simples tweets, sur un compte qui affiche à peine 1 500 abonnés.
Initialement doté de 2,5 millions d’euros, le fonds Marianne lancé le 20 avril 2021 par Marlène Schiappa après le choc causé par l’assassinat du professeur Samuel Paty, visait à financer des associations portant des discours de promotion des valeurs de la République pour apporter, notamment sur les réseaux sociaux, la contradiction à l’islam radical.
L’IGA souligne également que « l’appel à projet » du CIPDR pour sélectionner les initiatives « n’a été ni transparent ni équitable ». Elle regrette que « l’utilisation faite de la subvention reçue par l’USEPPM n’[ait] pas été conforme aux objectifs fixés dans la convention » entre elle et le CIPDR, et qu’« une partie de la subvention n’[ait] pas été dépensée conformément à la convention ». La mission « préconise » que « le CIPDR demande à l’USEPPM le remboursement de près de la moitié de la subvention versée ».
La totalité des recommandations de l’IGA « seront mises en œuvre », promet Beauvau. Selon le ministère, un autre rapport de l’IGA sur l’ensemble des 17 associations bénéficiaires du fonds sera remis fin juin.