Ah, le grand cirque des finances publiques françaises ! Dans l’arène de la Haute assemblée, les lions ne sont pas les élus, mais les chiffres : féroces, indomptables, et surtout, incontrôlables. On apprend donc avec un mélange d’amusement et de consternation que Bruno Le Maire, l’ancien dompteur en chef de Bercy, et ses acolytes Élisabeth Borne et Gabriel Attal, seront sommés de s’expliquer sur ce que l’on peut gentiment appeler « le dérapage des finances publiques ». Une pirouette de plus ou de trop pour les funambules de l’exécutif ?
Premier à se jeter dans la fosse aux lions le 7 novembre à 08h00, Bruno Le Maire, celui qui nous promettait encore hier des lendemains budgétaires qui chantent. Pendant des années, l’ancien ministre a jonglé avec les chiffres, dressant des bilans plus optimistes que réalistes, avant de les faire disparaître dans un brouillard d’opacité bien pratique. À chaque débat, c’était le même numéro : “Faites-nous confiance”, clamait-il, les bras chargés de promesses. Aujourd’hui, il doit rendre des comptes face à un Sénat qui l’a régulièrement accusé d’insincérité. On sort le popcorn.
Et puis, le spectacle continue. Gabriel Attal, lui aussi passé par la case Bercy, sera auditionné le 8 novembre, suivi d’Élisabeth Borne, l’ancienne Première ministre, le 15. Leurs apparitions promettent d’être tout aussi réjouissantes. Car eux aussi, sous couvert de gestion responsable, n’ont cessé de brandir l’art de l’équilibre budgétaire tout en marchant sur un fil de dettes. Un fil qui, avouons-le, est maintenant bien effiloché.
Le Sénat, tel un vieux dompteur, n’a pas l’intention de lâcher prise. Relançant une mission d’information avec une ardeur renouvelée, il semble prêt à pointer du doigt tous les faux pas de la troupe gouvernementale. Avec un déficit public qui pourrait dépasser les 6% du PIB en 2024, le rideau de fumée s’est dissipé. À qui la faute ? C’est la question qui hante le Sénat, qui jusqu’à récemment critiquait vertement les acrobaties financières de l’exécutif.
Mais ne nous y trompons pas, derrière ces joutes verbales et le jeu des reproches se cache une réalité beaucoup plus prosaïque. Une France qui s’enfonce dans les dettes, avec des gouvernants qui semblent aussi perdus qu’un jongleur manquant de balles. Pendant ce temps, l’Assemblée nationale a lancé une commission d’enquête, tout aussi déterminée, espérant faire toute la lumière sur l’art et la manière d’empiler des milliards sans que rien ne s’écroule.
Là où le texte du budget 2025 prévoit encore des “économies” – un doux euphémisme pour des coupes sombres de 60 milliards d’euros –, on ne peut s’empêcher de s’interroger sur cette étrange passion qu’ont nos dirigeants pour les acrobaties comptables. Ils prétendent désormais redresser la barre, mais, soyons honnêtes, qui croit encore à ces discours quand le bateau sombre ?