Dans les premières heures de ce jeudi, une opération conjointe des forces israéliennes a abouti à l’élimination de cinq terroristes dans le camp de Nur al-Shams, à Tulkarem. Parmi eux, Muhammad Jaber, alias Abu Shuja, figure emblématique de la résistance armée et responsable de l’assassinat d’Amnon Mukhtar à Qalqilya il y a deux mois.
L’opération nocturne, qui a ciblé une mosquée abritant les terroristes, a illustré la détermination d’Israël à agir avec force contre ceux qu’il considère comme des menaces directes. Les missiles d’épaule, les encerclements, et les assauts éclairs : autant de tactiques qui, bien qu’efficaces sur le plan militaire, ne peuvent masquer la complexité du terrain et des dynamiques politiques en jeu. À chaque raid réussi, la question demeure : s’agit-il d’un pas vers la paix, ou simplement d’un nouvel épisode dans un cycle sans fin de violence et de représailles ?
Abu Shuja n’était pas un inconnu. Sa réputation de stratège et de leader imprévisible en faisait une cible prioritaire pour Israël. Mais sa popularité dans certains cercles palestiniens reflète également un malaise profond, une colère qui dépasse sa seule personne. En attaquant ceux qui prennent les armes, Israël cherche à sécuriser son territoire, mais nourrit aussi, malgré lui, un ressentiment qui se traduit par de nouveaux engagements et de nouvelles recrues dans les rangs de la résistance.
Deux mois avant son élimination, le New York Times avait interviewé Abu Shuja. Il avait alors critiqué ceux qui restent armés face à Israël sans agir, tout en affirmant ne pas mener une guerre contre l’Autorité palestinienne. Ses propos, teintés d’une certaine rhétorique de défi, résonnaient comme un avertissement : la résistance n’est pas monolithique, et ses factions, parfois divisées, peuvent trouver des terrains d’entente face à un ennemi commun.
Cette opération met également en lumière les tensions entre Israël et l’Autorité palestinienne. Les forces de sécurité palestiniennes avaient déjà tenté de capturer Abu Shuja, mais avaient échoué, soulignant ainsi leurs limites et la fragilité de leur coopération sécuritaire avec Israël. Ce qui est en jeu, ce n’est pas seulement l’élimination d’individus qualifiés de terroristes, mais la stabilité d’une région où chaque action militaire peut provoquer des répercussions inattendues.
Enfin, il ne faut pas oublier la dimension humaine : Amnon Mukhtar, 66 ans, n’était pas un soldat, mais une victime d’une violence qui ne fait pas de distinction entre civils et combattants. Son assassinat a servi de déclencheur pour cette opération, rappelant que derrière chaque statistique, il y a des vies brisées, des familles endeuillées, et un tissu social qui se délite un peu plus à chaque attaque.
Israël a peut-être gagné une bataille cette nuit, mais la guerre des narrations continue. Et dans ce conflit, les éliminations ciblées, aussi précises soient-elles, ne sauraient à elles seules rétablir la paix. La réponse se trouve peut-être ailleurs, dans des dialogues encore inenvisageables pour le moment, pourtant essentiels si l’on veut éviter que cette escalade ne devienne, une fois de plus, inévitable.