La Cour de cassation doit se prononcer, ce vendredi 28 juillet, sur un éventuel renvoi du garde des Sceaux, Éric Dupond-Moretti, devant la Cour de justice de la République (CJR) pour une affaire supposée de prise illégale d’intérêts. Le ministre est soupçonné d’avoir profité de sa fonction pour régler des comptes avec quatre ex-magistrats.
Éric Dupond-Moretti sera-t-il renvoyé devant la Cour de justice de la République ? C’est la décision que doit rendre la Cour de cassation, ce vendredi 28 juillet, dans l’affaire qui oppose le garde des Sceaux à trois ex-magistrats du Parquet national financier (PNF), et un ex-juge d’instruction monégasque auxquels il s’était opposé dans sa première vie d’avocat.
Dans le détail, la première affaire concerne l’enquête administrative ordonnée par Éric Dupond-Moretti en septembre 2020, visant trois magistrats du PNF. Ces magistrats avaient fait éplucher ses factures téléphoniques détaillées quand le ministre était encore un ténor du barreau, dans le but de débusquer une éventuelle taupe qui aurait informé l’ex-président Nicolas Sarkozy qu’il était sur écoutes dans l’affaire dite «Paul Bismuth». L’ex-patronne du PNF, Éliane Houlette, et deux figures de ce parquet, Patrice Amar et Ulrika Delaunay-Weiss, ont été définitivement blanchis.
Le second dossier concerne l’enquête administrative déclenchée par Éric Dupond-Moretti contre un ancien juge d’instruction détaché à Monaco, Édouard Levrault, qui avait mis en examen un de ses ex-clients quand il était avocat. Éric Dupond-Moretti avait à l’époque critiqué ses méthodes de «cow-boy». En septembre, le Conseil supérieur de la magistrature (CSM) a écarté toute sanction contre lui.
Des irrégularités dans la procédure ?
Pour ces deux affaires, la commission d’instruction de la CJR, seule juridiction apte à juger les ministres pour des actes commis dans l’exercice de leurs fonctions, a ordonné début octobre 2022 le renvoi de l’ex-ténor des assises en procès.
Me Patrice Spinosi, avocat d’Éric Dupond-Moretti, a annoncé avoir relevé des irrégularités qui seraient apparues au cours de la procédure devant la CJR. Il a dénoncé les «errements procéduraux» de la CJR pendant son enquête et demandé la cassation de plusieurs décisions de la commission d’instruction, réclamant que son client soit traité tel «un justiciable comme les autres». Si sa plaidoirie était suivie, le dossier reviendrait entre les mains de la commission d’instruction de la CJR, nouvellement composée, qui serait amenée à se prononcer à nouveau sur les charges pesant sur Éric Dupond-Moretti.
Frédéric Desportes, avocat général près la Cour de cassation, a reconnu certaines irrégularités, mais a proposé de valider globalement la procédure. «Il n’est pas nécessaire de casser l’arrêt de renvoi», a-t-il assuré. Si la Cour de cassation le suit, elle «videra le contentieux dans l’intérêt d’une bonne administration de la justice», sans retarder l’audience de jugement, espère-t-il, avant la réponse de la Cour, ce vendredi.
Tout au long de l’enquête, le garde des Sceaux a dénoncé une instruction de la CJR à charge, et a répété n’avoir fait que «suivre les recommandations de son administration» en déclenchant les enquêtes.