Kamala Harris, candidate à la présidence des États-Unis ? Si cette idée pouvait un jour susciter espoir ou excitation, l’annonce officielle de sa candidature, le samedi 27 juillet, a surtout provoqué des haussements d’épaules. Non pas que la vice-présidente manquait de qualités ou d’expérience – son parcours est riche, varié, voire parfois impressionnant – mais Kamala Harris incarne l’opportunisme politique à son paroxysme.
L’ironie est saisissante. Kamala Harris, autrefois procureure redoutée, accumulant les condamnations et affichant une rigueur implacable, est aujourd’hui connue pour son absence de mordant. Celle qui, à San Francisco, imposait des sanctions dures, y compris pour des délits mineurs, est devenue l’ombre de Joe Biden dans une vice-présidence presque oubliée. Autrefois dure et intraitable, elle semble désormais peiner à s’affirmer sur les sujets décisifs. De la gestion des frontières à la crise de l’immigration, ses interventions sont souvent jugées maladroites, ses décisions inefficaces, et sa visibilité politique quasi inexistante.
Le contraste avec son mentor, Willie Brown, n’a jamais été aussi frappant. L’ancien maire de San Francisco, homme politique influent et stratège, a été celui qui l’a propulsée sur la scène politique californienne. Charismatique et calculateur, il a su naviguer avec brio dans les eaux troubles de la politique américaine, mais Kamala Harris, elle, peine à convaincre qu’elle possède cette même capacité à diriger, à trancher, à inspirer.
C’est d’ailleurs l’une des critiques les plus souvent adressées : son manque de constance. Au fil de sa carrière, Kamala a changé de position sur de nombreux sujets – de la légalisation de la marijuana à la réforme de la santé, en passant par la criminalisation de l’immigration illégale. Si la flexibilité politique est souvent nécessaire, chez Kamala Harris, cela ressemble davantage à de l’opportunisme qu’à une véritable évolution de pensée.
Et que dire de son passé judiciaire ? Les défenseurs des droits civiques n’ont pas oublié ses réticences à rouvrir des affaires controversées malgré des preuves d’innocence, ou encore ses liens étroits avec les banques lors des négociations du National Mortgage Settlement. Ironiquement, alors qu’elle s’oppose farouchement à Steven Mnuchin lors de sa nomination au poste de secrétaire du Trésor sous Donald Trump, c’est ce même Mnuchin qui avait soutenu sa campagne sénatoriale quelques années plus tôt.
Kamala Harris a souvent été là où il fallait être, au bon moment, avec les bons soutiens. Mais cette capacité à naviguer les coulisses du pouvoir ne suffit pas toujours à masquer un manque de vision claire.
C’est peut-être là le problème fondamental. Les démocrates, aujourd’hui, semblent fatigués, en manque d’idées fraîches, et surtout d’une figure forte capable de fédérer. Kamala Harris, malgré son parcours, n’a jamais su imposer son leadership. Lors de la primaire de 2020, elle s’est rapidement retirée faute de soutiens populaires et financiers, avant de revenir dans la course sous l’aile de Joe Biden, non pas en tant que leader, mais comme second couteau. Même là, elle n’a jamais véritablement trouvé sa place.
Depuis, le retrait de Joe Biden, affaibli par l’âge et la santé, laisse un vide que Kamala Harris n’est peut-être pas capable de combler. Elle se retrouve là, par défaut, faute d’alternative claire pour le parti. Pour beaucoup, elle représente la continuité d’une administration qui peine à séduire les Américains. Les démocrates espèrent ainsi éviter un retour en force des républicains, mais à quel prix ? En sacrifiant l’ambition pour la stabilité, ils risquent de pousser les électeurs vers une alternative plus radicale.
Alors, Kamala Harris peut-elle réellement convaincre les Américains de lui confier les clés de la Maison Blanche ? Sa campagne semble marquée par l’ombre de Joe Biden, avec la promesse d’une continuité plus que d’un renouveau. Et c’est bien là que réside son plus grand défi : comment se démarquer sans trahir le bilan de l’administration Biden, tout en apportant des réponses aux défis pressants que rencontrent les États-Unis ? Sa candidature semble plus être un signe de résignation qu’un véritable choix d’avenir.