Le Brésil, hôte du sommet du G20 organisé lundi et mardi à Rio de Janeiro, a mis sur la table une proposition ambitieuse. Instaurer une taxation mondiale des grandes fortunes. Le président Luiz Inacio Lula da Silva a profité de ce rassemblement des principales économies mondiales pour défendre une taxe annuelle de 2 % sur la richesse totale des milliardaires, espérant ainsi convaincre ses homologues de la nécessité de réduire les inégalités économiques.
Inspiré par les travaux de l’économiste français Gabriel Zucman, ce plan vise à taxer non seulement les revenus, mais aussi le patrimoine global des ultrariches, y compris leurs actifs immobiliers, participations dans les entreprises et autres investissements.
L’idée repose sur un constat accablant. Les 0,01 % les plus riches de la population mondiale paient un taux effectif d’imposition de seulement 0,3 % sur leur patrimoine.
Selon les estimations, une telle taxe pourrait rapporter jusqu’à 250 milliards de dollars par an, une manne financière capitale pour financer des projets sociaux et environnementaux.
Ce n’est pas une question de justice sociale uniquement, mais d’efficacité économique. L’argent doit circuler
a insisté Lula, soutenu par des pays comme la France, l’Afrique du Sud et l’Espagne.
Malgré l’enthousiasme du Brésil et de ses alliés, la proposition fait face à une opposition marquée, notamment de la part des États-Unis et de l’Allemagne. Lors d’une réunion préparatoire en juillet dernier, la secrétaire américaine au Trésor, Janet Yellen, avait écarté l’idée, affirmant qu’une telle taxation serait difficile à coordonner au niveau international. Berlin, de son côté, a qualifié la mesure de “peu pertinente”.
Reunião sobre democracia, integração e cooperação na nossa querida América Latina. Com @petrogustavo, @Claudiashein e @GabrielBoric. 🇧🇷🇨🇴🇲🇽🇨🇱
— Lula (@LulaOficial) November 18, 2024
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Les débats reflètent une division profonde entre les partisans d’une fiscalité mondiale plus équitable et ceux qui privilégient des approches nationales. Washington, notamment, s’est montré inflexible, arguant qu’il revient à chaque pays de concevoir un système fiscal progressif adapté à sa réalité.
Un succès partiel pour Brasilia
Malgré les réticences, le G20 a franchi un premier pas en adoptant lundi une déclaration commune, affirmant leur volonté de travailler de manière coopérative pour “assurer que les personnes très fortunées soient effectivement taxées”. Une avancée saluée comme “historique” par Gabriel Zucman.
Parallèlement, Lula a atteint un autre objectif central de sa présidence : le lancement de l’Alliance mondiale contre la faim et la pauvreté. Cette initiative regroupe 81 pays, 24 organisations internationales et 31 ONG, et vise à éradiquer la faim, qualifiée par Lula de “plaie qui fait honte à l’humanité”.
Un contexte géopolitique chargé
Cependant, l’ambitieux projet brésilien pourrait souffrir des multiples crises internationales qui dominent les discussions, notamment la guerre en Ukraine, le conflit à Gaza et la crise climatique. La tâche est d’autant plus ardue que Brasilia a récemment vu sa propre proposition de taxe nationale sur les grandes fortunes rejetée par sa Chambre des députés.
Si l’idée d’une taxation mondiale des milliardaires reste à ses balbutiements, le sommet de Rio marque une étape importante dans le débat international sur l’équité fiscale. Lula, à travers cette proposition, affirme la volonté du Sud global de peser davantage dans les décisions mondiales et de défendre un système économique plus solidaire.