Depuis plusieurs années, les agriculteurs français expriment leur vive opposition à l’accord de libre-échange entre l’Union européenne et les pays d’Amérique latine, un accord en négociation depuis 1999.
Au cœur de la revendication des agriculteurs se trouve la réduction des droits de douane prévue pour les importations en provenance d’Amérique du Sud, une mesure perçue comme une concurrence déloyale par les agriculteurs français.
Parmi les principales demandes des syndicats agricoles français, toutes tendances confondues, figure un moratoire sur les accords de libre-échange. Si certains secteurs de l’agriculture pourraient bénéficier de ces accords, la majorité des agriculteurs craignent une compétition déséquilibrée. Le projet d’accord avec le bloc latino-américain Mercosur, en particulier, suscite de vives critiques depuis sa discussion en 1999.
Emmanuel Macron aborde cette question avec fermeté. Il doit rencontrer ce jeudi la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen pour discuter notamment de l’accord avec le Mercosur, qu’il oppose vigoureusement. Mais quels sont les tenants et les aboutissants de ce texte ?
Des réductions de droits de douane et des préoccupations sur les normes de production
L’accord avec le Mercosur, comme d’autres accords similaires, prévoit une réduction des droits de douane. Par exemple, le Brésil bénéficiera d’une plus grande liberté pour exporter sa viande de bœuf en Europe en payant moins de taxes. Les différences de normes de production entre l’Union européenne et les pays du Mercosur inquiète particulièrement les agriculteurs français.
Elvire Fabry, responsable de la géopolitique du commerce à l’Institut Jacques Delors, souligne que les conditions de production des produits agricoles sont un point crucial et difficile à négocier. Les agriculteurs français redoutent que les normes moins contraignantes au Brésil ne créent une concurrence déloyale.
Impact sur les différentes exploitations agricoles
Cette concurrence inégale risque de fragiliser davantage les petites exploitations agricoles françaises. Xavier Hollandts, professeur à Kedge Business School et spécialiste des questions agricoles, estime que les plus vulnérables sont déjà les petits exploitants qui ne disposent pas des mêmes capacités de compétition que les grandes exploitations.
En contrepartie, la France espère augmenter ses exportations de produits typiquement français tels que les vins, les spiritueux et les fromages, qui ont une forte demande à l’étranger. Toutefois, cette perspective ne semble pas suffisante pour apaiser les préoccupations des agriculteurs face à la concurrence étrangère.
39% des Français jugent l’Union Européenne principale responsable de la crise agricole
Un récent sondage CSA, mené pour nos confrères d’Europe 1, CNews et le JDD, met en exergue une perspective surprenante : 39 % des Français estiment que l’Union européenne porte la plus grande part de responsabilité dans la crise agricole actuelle. Les résultats du sondage démontre que les personnes interrogées soulignent des mesures contraignantes mises en place par l’UE, notamment en matière de préservation de l’environnement, sujet perçu comme un poids excessif pour le secteur agricole.
Par ailleurs, le sondage révèle d’autres acteurs perçus comme responsables de cette crise. 32 % des sondés considèrent les grandes enseignes de distribution comme des coupables majeurs, critiquant leur promesse initiale de lutter contre l’inflation, tandis que seulement 29 % pointent du doigt le gouvernement. Les agriculteurs eux-mêmes, ne sont accusés que par une faible proportion, soit 6 % des personnes interrogées. Les résultats varient également en fonction de l’âge et de l’orientation politique, illustrant une diversité d’opinions au sein de la société française.