Ils sont souvent invisibles, parfois critiqués, mais toujours indispensables. Les agriculteurs français, en colère, se mobilisent à nouveau. Cette fois, leur combat dépasse le cadre de leurs exploitations. C’est la souveraineté alimentaire de la France et de l’Europe qu’ils défendent. Et si leur lutte nous concernait tous, bien plus qu’il n’y paraît ?
L’accord de libre-échange entre l’Union européenne et le Mercosur, vanté par certains comme un moteur économique, ressemble à un cheval de Troie. Sous couvert de « libéralisation », il autorise l’importation massive de produits agricoles, souvent cultivés ou élevés dans des conditions bien éloignées de nos normes. Poulets traités au chlore, viande bovine aux hormones, soja issu de la déforestation… Est-ce vraiment ce que nous voulons dans nos assiettes ?
Pendant ce temps, nos agriculteurs, soumis à des règles strictes en matière de traçabilité, de bien-être animal et d’écologie, peinent à survivre. Chaque hectare cultivé en France respecte des exigences que nous, citoyens, réclamons à juste titre. Mais ces exigences ont un coût. Et face à des produits étrangers qui ne respectent ni ces règles ni nos valeurs, nos agriculteurs jouent à armes inégales.
La colère des agriculteurs ne se mesure pas uniquement en embouteillages ou en champs de blé abandonnés. Elle se lit sur les visages fatigués de femmes et d’hommes qui travaillent sans relâche, malgré les crises qui s’enchaînent : aléas climatiques, flambée des coûts, maladies animales, endettement chronique.
Ce ne sont pas des clichés, ce sont des réalités. Chaque tracteur sur une route est le symbole d’une exploitation qui lutte pour exister, d’une famille qui refuse de baisser les bras. Ces agriculteurs ne réclament pas la charité, mais simplement la reconnaissance de leur rôle essentiel.
La souveraineté alimentaire, un enjeu stratégique
Derrière cette mobilisation, il y a une question fondamentale. Voulons-nous conserver notre capacité à nourrir notre population ? Si la réponse est oui, alors soutenir nos agriculteurs devient une nécessité stratégique.
La souveraineté alimentaire ne se résume pas à un slogan. Elle implique de pouvoir produire localement une alimentation de qualité, dans le respect de nos normes. Elle signifie aussi limiter notre dépendance à des importations issues de pays où les règles environnementales et sociales sont souvent absentes.
Chaque hectare perdu en France est une victoire pour ceux qui exploitent la planète sans scrupules. Chaque agriculteur qui abandonne son métier fragilise notre capacité à résister aux crises, qu’elles soient climatiques, géopolitiques ou économiques.
Le devoir des pouvoirs publics et des citoyens
Il est facile de critiquer les agriculteurs lorsqu’ils bloquent des routes. Mais il est tout aussi facile d’oublier qu’ils sont les premiers à garantir la qualité et la diversité de notre alimentation. La faute ne leur revient pas, elle est systémique.
Les pouvoirs publics doivent cesser de multiplier les grands discours tout en signant des accords qui les condamnent. Protéger nos agriculteurs, c’est protéger notre indépendance et nos territoires.
Mais cette responsabilité ne repose pas uniquement sur l’État. Nous, consommateurs, avons aussi notre rôle à jouer. Acheter local, privilégier les circuits courts, refuser les produits dont l’origine est douteuse : autant d’actions concrètes qui soutiennent nos agriculteurs.
Une mobilisation légitime, un combat collectif
Le mouvement de cette semaine est bien plus qu’un cri de désespoir. C’est un appel à la prise de conscience. Derrière les revendications se cache une vérité essentielle : ce qui est en jeu, ce n’est pas seulement l’avenir des agriculteurs, mais celui de toute une nation.
Alors, au lieu de les regarder avec agacement ou indifférence, soutenons-les. Non par charité, mais par conviction. Car dans leur combat, il y a l’écho de nos valeurs : justice, qualité, et un profond respect de la terre.
Si nous laissons nos agriculteurs disparaître, ce ne sont pas seulement des fermes que nous perdrons, mais une partie de ce que nous sommes. Et cela, ni un accord, ni un traité ne pourront jamais le compenser.