Alors que le remaniement qui agite la classe politique depuis plusieurs jours semble imminent, le chef de l’État s’est résolu lundi à maintenir la Première ministre dans ses fonctions. D’autres ministres sont toutefois visés par des ajustements et certains se retrouvent sur la sellette.
Dans une vie antérieure j’ai été à votre place et je sais que ces moments ne sont jamais agréables » a affirmé le président lors du dîner organisé mardi soir à l’Élysée. Des « ajustements » de l’équipe gouvernementale d’Elisabeth Borne doivent en effet être annoncés dans la soirée de ce mercredi 19 juillet, à en croire plusieurs sources ministérielles. Si de nombreuses interrogations demeurent sur son ampleur, une seule certitude, il sera bouclé d’ici à la fin de la semaine.
Après avoir songé, selon plusieurs sources macronistes, à remplacer la Première ministre par son ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin, Emmanuel Macron a finalement décidé de la maintenir à la tête du gouvernement. C’est elle qui sera d’ailleurs chargée de dévoiler sa nouvelle équipe.
Restera ? Ne restera pas ? C’est donc la question ultime qui taraude de nombreux ministres. A la mi-juin Elisabeth Borne avait dressé le portrait-robot des membres du gouvernement capables d’avoir «la vision, la capacité à diriger leur administration, à porter des textes au Parlement ». Or, plusieurs d’entre eux, issus de la société civile, pourraient bien faire les frais d’un manque d’incarnation politique.
Tandis qu’un remaniement à six ou sept portefeuilles est envisagé, le duo exécutif s’est entretenu dans la soirée de mardi, pendant près d’une heure, afin de peaufiner la liste des membres appelés à sortir du gouvernement et leurs remplaçants. Mais pour l’heure, à l’Élysée, rien ne filtre sur le calendrier et les intentions du chef de l’Etat. En attendant, les réunions s’enchaînent, et avec elles le ballet des voitures dans la cour du Palais, comme si de rien n’était.
Marlène Schiappa sur le départ
Enlisée dans l’affaire du Fonds Marianne, et vivement critiquée, parfois même depuis son propre camp, après son interview polémique dans Playboy, Marlène Schiappa semble avoir épuisé tous les crédits qui la maintenaient en odeur de sainteté auprès du premier cercle présidentiel, et notamment d’Emmanuel Macron, qui appréciait, au moins à l’époque, son franc-parler, ses positions assumées, et son côté self-made, lui rappelant probablement à certains égards son propre parcours.
Pourtant, aujourd’hui, la donne a bien changé pour la secrétaire d’Etat à l’Economie sociale et solidaire. Clairement menacée, elle pourrait être invitée à faire ses valises pour éviter que les conséquences de l’affaire du Fonds Marianne ne viennent trop éclabousser le gouvernement, qui se veut lancé dans un nouveau projet politique.
Pap Ndiaye et François Braun menacés
Du côté de l’Education nationale et de la Santé, les deux ministres issus de la société civile, Pap Ndiaye et François Braun, n’auront finalement jamais réussi à faire leur trou dans des ministères traditionnellement réputés pour leur difficulté.
Alors que le premier, étiqueté à gauche et réputé peu politique, a vu ses initiatives rabotées, parfois même dans son propre camp, le second – qui n’a jamais caché son manque d’ambition politique – n’a pas réussi à marquer de son empreinte une administration en crise, en pleine période post-Covid. Les deux hommes pourraient faire les frais de leur manque d’expérience à des postes de haute responsabilité.
D’autres ministres aux noms moins ronflants pourraient voir leur place menacée, à l’image de Franck Riester aux relations avec le Parlement, de Jean-Christophe Combe aux Solidarités qui s’était montré réticent sur le projet d’« aide active à mourir », ou encore de Christophe Béchu et Agnès Pannier-Runacher, respectivement à l’Ecologie et à la Transition énergétique, qui ont tous été jugés peu audibles auprès des Français. Ces derniers pourraient se voir remplacer par des profils plus marqués.
Enfin, faute d’avoir renoué avec les associations, la ministre déléguée aux personnes Handicapées, Geneviève Darrieussecq pourrait elle aussi quitter le gouvernement.
Olivier Klein dans le viseur ?
En première ligne depuis les violences urbaines qui ont secouées la France depuis la mort de Nahel, le ministre de la Ville et du Logement serait lui aussi concerné par le remaniement.
Après un plan logement jugé décevant par les acteurs du secteur, Olivier Klein, régulièrement dans l’ombre du duo Dupond-Moretti et Gérald Darmanin, n’est pas parvenu à s’imposer pendant les récentes révoltes. En outre, si certains macronistes reconnaissent son manque de maîtrise des circuits du pouvoir, les contours de son ministère sont à l’étude. Le patron des députés MoDem Jean-Paul Mattei a ainsi plaidé en faveur d’un « grand ministère » du Logement.
Des postes conservés et de potentielles promotions
Si l’objectif d’un remaniement demeure celui d’imprimer un certain renouveau dans le premier cercle du paysage politique, plusieurs ministres ont su faire leur trou, marquer les esprits, ou prouver leur efficacité auprès du chef de l’Etat, et pourraient ainsi conserver leur poste, voire espérer une promotion.
C’est notamment le cas de Rima Abdul Malak à la Culture, ou encore de Bruno Le Maire à Bercy et de Gabriel Attal au Budget. Tous devraient faire partie du prochain casting, avec une petite nuance pour Bruno Le Maire, dont le nom est évoqué du côté de l’Education nationale. A un an des Jeux Olympiques, la ministre des Sports, Amélie Oudéa-Castera, semble elle-aussi bien installée.
Porte-parole du gouvernement, Olivier Véran n’a jamais caché son vœu de piloter un ministère plein. Élisabeth Borne voudrait d’ailleurs garder cet « allié » de l’aile gauche de la macronie, mais la décision finale reviendra au président.
Place Beauvau, Gérald Darmanin se sait en position de force au sein du gouvernement. Il pourrait de son côté devenir ministre d’Etat, une marque de son poids grandissant au sein de l’exécutif.
Des adaptations d’envergure risquent de passer inaperçue en plein milieu des vacances, selon certains, pour qui la manœuvre a surtout pour but de faire sortir des ministres jugés trop faibles sur leur périmètre. Une seule évidence, selon plusieurs conseillers ministériels, « le président ne veut pas d’un gros remaniement, la Première ministre pousse pour ».